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Le Chief Data Officer est le nouvel invité du Comité exécutif

Après l’avènement des systèmes d’informations, la donnée et son utilisation intelligente sont le nouvel enjeu stratégique des entreprises 

La révolution numérique a transformé le paysage des comités de direction. Si le début des années 2000 avait marqué l'entrée du Chief Information Officer (CIO) au sein du Comité Exécutif (Comex), l'essor d'Internet a rapidement révélé la nécessité cruciale de placer les experts en technologies de l'information au cœur même des décisions stratégiques. Le paysage évoluant sans cesse, durant la première décennie de ce siècle, une nouvelle ère a émergé : celle de l'entreprise informatisée et largement assistée par les logiciels. Cela va bien au-delà de la simple utilisation des technologies de l'information pour soutenir les opérations. Cela englobe aussi un enrichissement significatif des volets physique et logiciel des produits. 

Ainsi, l’industrie automobile, autrefois très axée sur la partie mécanique du produit, s'est métamorphosée pour digitaliser 100% de la conception de bout en bout et intégrer massivement des composants logiciels dans les véhicules et les services proposés à ses clients. L'innovation ne se limite plus aux aspects physiques des véhicules, mais elle s'étend de manière cruciale à l’ensemble des fonctionnalités et des performances des logiciels associés.

Ainsi, il devient progressivement naturel d'accueillir le Chief Digital Officer (CDO) au sein du Comex. Cela reflète la nouvelle réalité de l’entreprise où le numérique et la data occupent le devant de la scène. Pour préciser le rôle du CDO : bien que partageant des acronymes similaires, le CDO « Digital » est souvent cantonné à la transformation des usages, tandis que le CDO « Data » est dédié à l'ensemble des transformations stratégiques liées à la donnée, du fonctionnel au juridique, en passant par les RH et la transformation numérique. C’est-à-dire toutes les transformations transverses de l’entreprise autour de la donnée.  

Dans ce contexte, où l’environnement est aussi un axe d’évolution clés : quel directeur occupera la prochaine place au Comex ? Est-ce le responsable de la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) ou le CDO (data) ? 

Il nous semble plus légitime que le CDO (Data) rejoigne rapidement le Comex. Nous sommes passés d'un monde digital à un monde gouverné maintenant par la donnée. Pour esquisser une métaphore évocatrice, si l'informatique et les réseaux sont le système nerveux de l'entreprise, aujourd'hui dirigée par le CIO, alors la donnée en est le cerveau et elle doit être pilotée par un directeur dédié: le CDO. Cette évolution symbolise non seulement une réponse pragmatique aux exigences de l'ère numérique mais également une reconnaissance de la centralité de la donnée dans la prise de décision stratégique au plus haut niveau de l'entreprise. 

L’arrivée du CDO au sein du comex doit permettre de répondre à ces enjeux : 

La valeur des données ne cesse de croître, et les directeurs de la donnée doivent jouer un rôle de leader au sein de leurs organisations. Mais leur travail n’est pas facile, car ils rencontrent de nombreux obstacles pour accomplir leurs objectifs. Quand ils arrivent à leur poste, les CDO peuvent peiner à obtenir l’attention et le soutien des dirigeants de toute l’organisation. Ils sont pourtant indispensables pour avoir une vision globale sur les assets stratégiques dont ils ont la charge.  

  • Favoriser l'interdisciplinarité: dans de nombreuses entreprises, les données ont souvent été traitées de manière éparpillée. Ainsi leur gestion rencontre des problèmes de définition, de cohérence, de partage et d’agrégation souvent complexes. D’autant que la gestion des priorités divergentes au sein des différentes unités de l'entreprise crée facilement des conflits. 
  • Créer le lien entre l’opérationnel et la technique: le directeur de la donnée doit également relever un défi de légitimité difficile. S'il s'attarde trop sur les aspects techniques, il risque d'être subordonné à la Direction des Systèmes d'Information (DSI), et sera donc éloigné du comex. En revanche, s'il se focalise uniquement sur la gouvernance, son rôle pourrait devenir redondant par rapport au Chief Operating Officer (COO). Enfin, une immersion trop profonde dans le domaine fonctionnel pourrait le transformer en Chief Digital Officer (CDO) et lui faire perdre sa légitimité à contribuer à la stratégie de l’entreprise. 
  • Être l’autorité en charge de la cohérence et l’efficacité des échanges: le CDO doit aussi pouvoir exercer une responsabilité managériale envers les Data Owners et les équipes IT. Cette responsabilité va bien au-delà de la gestion des données techniques et implique aussi de gérer l'impact sur les ressources humaines en redéfinissant les rôles et les responsabilités au sein de l'entreprise. Sans une organisation managériale adaptée, il se retrouvera obligé de recourir au management par influence. Ce qui, à long terme, peut se révéler laborieux et inefficace. Ces domaines de compétence fortement interdisciplinaires sont la garantie d’une utilisation optimale des données pour permettre à l'entreprise d’atteindre ses objectifs de transformation. La difficulté de leur mise en œuvre, des arbitrages qu’ils imposent démontre toute la pertinence de son rôle au sein des organisations qui souhaitent innover en s’appuyant sur leurs données. 

D’autant qu’avec l’accélération des usages de l'IA, la donnée jouera un rôle de plus en plus central :  

Dans un monde où chaque réunion est enregistrée, chaque moment numérique devient une partie du puzzle qui forme la personnalité digitale de l'entreprise. L'intelligence artificielle, pouvant être omniprésente, elle pourra demain s'adapter de manière dynamique aux discussions et aux événements transversaux dans l'entreprise. Ce nouvel objet numérique, culture dématérialisée de l’entreprise, pourra varier entre l'hyper-personnalisé et l'aseptique en fonction des paramétrages accordés.  

Alors que cette nouvelle ère se profile, il est impératif de reconnaître que la gestion efficace de la donnée est bien plus qu'une nécessité opérationnelle ; c'est un enjeu stratégique qui détermine la manière dont une entreprise sera présente et interagira dans le monde numérique. Ainsi le Chief Data Officer apparaît comme le guide et apporte son expertise pour relever les défis à venir. Anticiper l'émergence de l'entreprise digitale exige une vision stratégique et une connaissance approfondie de la manière dont la donnée peut être le moteur de l'innovation et de la croissance. En intégrant le CDO au plus haut niveau de décision, les entreprises se positionnent non seulement pour naviguer avec succès dans cet environnement en constante évolution mais aussi pour créer une identité digitale unique et influente. C'est à travers cette anticipation et cette préparation que les entreprises peuvent véritablement prospérer dans le paysage numérique à venir. 

Auteurs : Antoine Nguyen & Philippe Lerique